CHRONIQUE 01/10

Publié le

CHRONIQUES  2010

 

PREMIERE  SEMAINE

 

Fin de partie pour la crèche et le Père Noël. Les soldes du ministère de la santé et des sports. Du concours organisé à cet effet. Quelques suggestions pour résorber les surplus médicaux. De bonnes résolutions. De la disparition de Seguin. Grandeur consécutive d’Allah.

 

 

 

On a rangé soigneusement la crèche  et plié le petit Jésus dans ses langes. Les Rois Mages ont finit de digérer leur galette, cette année la frangipane leur est restée sur l’estomac, l’âge sans doute. Ils ont rejoint, dans une boite, Marie, Joseph, le bœuf et l’âne, les oies, le chameau, le fifre, le tambourinaire, la vieille au fagot, les bergers et leurs moutons, le ravi et tout le petit monde du village provençal. Tout ce monde qui ne vit que quinze jours par an, par tradition. Les Pères Noëls de chiffon  et plastique suspendus aux balcons n’avaient pas fière allure après leur long séjour à toutes pluies et à tous vents. Ils ont fini à la poubelle, avec les rogatons et les résidus de bûches au chocolat. Triste fin, mais il faut bien finir, « tant crie-t-on  Noël, qu’il s’en va ».                                                                         

Et le temps s’accélère. Déjà les soldes[1]. Le Gouvernement donne lui-même l’exemple et solde le vaccin antigrippe et les masques assortis,  anti-projections et de protection, et les comprimés itou[2]. En effet, devant ce déploiement, le H1N1 ne se l’est pas fait dire deux fois, il a rapidement fait demi-tour. Il veillerait encore aux frontières, ce n’est donc pas le moment de baisser la garde. Notre Ministre de la Santé qui a payé de sa personne et s’est déjà fait vacciner plusieurs fois, vient de lancer un concours d’idées, pour écouler les surplus, de masques notamment. Quelques suggestions : tout d’abord équiper d’urgence en anti-projections tous les baveux, bavasseurs et autres crachoteux qui encombrent les ondes et les écrans, également les fumeurs qui s’enfumeraient beaucoup plus efficacement, en circuit fermé, aussi les cigognes qui transporteraient plus aisément les bébés. La mode estivale est en pleine préparation, nos stylistes pourraient aisément les adapter en soutien-gorge pour leur jeunettes anorexiques ou en slip de bain pour éphèbes bronzés maximalistes, (on a vu pire). La ménagère les utiliserait pour sa cafetière, au lieu et place de la traditionnelle chaussette, le fromager y égoutterait son gaperon, l’Auvergnat s’en protègerait les oreilles de la burle qui souffle sur ses hautes planèzes, la souris en ferait un nid douillet pour sa progéniture. Et puis, Carnaval va bientôt se préparer, quelle belle occasion de laisser libre cours à l’imagination de nos jeunes, d’autant que nous disposons de deux modèles de masques : le pliable, dit bec de canard, (style Donald), et le rigide, à coque, genre groin. Il s’imposait, s’agissant de grippe porcine …[3]. En dernier ressort, il resterait l’Afrique. Nous lui avons généreusement fait cadeau de notre verroterie, de nos plants de vigne, de nos brisures de riz, de nos surplus de lait en poudre, de nos vieilles kalachnikov, de nos mines anti-personnelles, de nos missionnaires et de leur bibles, de nos épaves de bagnoles, de notre Paris-Dakar, (mais de celui-ci, les Africains se sont lassé, il tue maintenant en Amérique du Sud), de nos vieux pneus, de nos boites de conserves, vides, de nos peilles, pour tout dire, de notre civilisation. Pourquoi notre bonne conscience ne donnerait- elle pas généreusement nos stocks en fin de vie aux Africains ? Ils sont industrieux et en feraient bon usage. En outre, ils ont l’habitude des médicaments frelatés et même, parait-il, des seringues usagées. Quant au Tamiflu, quelle belle occasion de l’expérimenter à grande échelle !

Dans la foulée, le Gouvernement envisagerait de solder le Rafale, les casernes, un certain Airbus, des tribunaux, des centrales nucléaires, la fonction publique, le Grenelle de l’environnement. Dans un premier temps.    

 

La première semaine de janvier est aussi celle où l’on se résout à prendre de bonnes résolutions. De grandes résolutions. Manger bio. Se mettre au régime, sans graisse, sans sucre, sans sel, sans alcool, sans fromage cuit, sans saucisson.[4] Manger des graines, de sarrasin, d’orge, de riz, de blé, de seigle, de mil et de millet, d’avoine même[5], pour mourir en bonne santé. Un picotin d’avoine le matin  et vous hennissez toute la journée, à la grande satisfaction de vos collègues de bureau. Et nous ne parlons pas du crottin qui fera la joie des géraniums du dit lieu, en saison. Reprendre la danse.[6] Ranger l’armoire à pharmacie, résolution renouvelée depuis plusieurs années. Marcher. Ne plus utiliser son scooter pour se rendre au travail, c’est risqué à partir d’un certain âge, et le chef en a fait remontrance. Relooker la salle de bains avec des stickers. Ne pas se laisser envahir par le vocabulaire anglo-saxon. Penser à débarrasser la cave des vieux cartons qui l’encombrent depuis votre emménagement. Et des bouteilles vides. Renoncer à comprendre quoi que ce soit aux femmes. Ressortir sa boite d’aquarelle. Eteindre la télé quand les émissions sont sans intérêt. Faire régulièrement son bilan carbone  et contrôler sa tension artérielle, spécialement en période électorale. Et surtout, ralentir. Ne vous inquiétez pas, le temps passera, inutile d’appuyer sur l’accélérateur. Ecoutez vos petits enfants, ils ont plein de choses à dire, qu’ils vous aiment, si vous écoutez bien. Arrêtez-vous pour écouter la neige fondre. Arrêtez-vous pour écouter craquer la glace de l’étang. Arrêtez-vous pour sentir la fumée du bois brulé, le voisin a allumé une flambée. Arrêtez-vous pour entendre, si le vent vient du sud, les cris des gamins sur la grande roue de la fête foraine, s’il vient du nord, la cloche aigrelette qui annonce la fermeture du cimetière. Arrêtez-vous pour repérer les traces sur la neige, les lourdaudes des pies, avec leur queue qui parfois traine, les délicates mais embrouillées des merles qui se chamaillent, les imperceptibles du rouge gorge et les inquiétantes du chat à la maraude. Arrêtez-vous pour envoyer un message au copain d’antan que vous savez bien seul. En cette saison les jours les plus courts sont encore bien longs, pour les vieux.

Et ne pas attendre le dernier moment pour écrire sa chronique.

 

Philippe Seguin nous a quittés. Sous d’unanimes louanges. Ecoutez son rire tonitruant. D’entendre tous ces faux-culs, il a failli avaler de travers la pizza XXL qu’il avait emportée pour le voyage. Là-haut, Dieu va lui confier les Comptes divins. Il est des anges-gardiens qui font des dépenses somptuaires pour bien peu d’efficacité. Dorénavant, ils n’auront qu’à bien se tenir.

Le gouvernement refuse le droit de grève aux imans, qui pourtant sont fonctionnaires. En Turquie. Ils viennent de manifester.

 

Et c’est ainsi qu’Allah est grand.     



[1] Soldes, au singulier comme au pluriel, est un substantif masculin, définitivement masculin. Ne pas se laisser abuser par le nombre de femmes que vous voyez se battre  à  mort pour un misérable chiffon qu’elles n’auraient pas regardé en période normale. « Remplacer le papier en rouleaux des cabinets par du papier en folios dépliables nous força à réfléchir toute une semaine … Finalement il fut décidé qu’on attendrait le mois des soldes… » Céline, Voyage au bout de la nuit. 

[2] La France a acquis 723 millions de masques de protection, un milliard de masques anti-projections et 33 millions de traitements antiviraux.

[3] Pour participer au concours d’idées, voir le site santé.sports.gouv.fr

[4] L’Auvergnat se refuse à envisager que son cochon qu’il a si amoureusement élevé, qui grognait de plaisir, d’affection et de contentement lorsqu’il lui préparait sa baccade, puisse, post mortem, lui jouer quelque mauvais tour de santé. D’autant qu’il n’en tue que la moitié, depuis que femme et enfants font régime.

[5] « Les fibres d’avoine sont naturellement présentes dans le grain d’avoine » dit l’emballage. On ne peut que s’incliner devant une aussi évidente affirmation, fruit, n’en doutons pas, de patientes et scientifiques observations.

[6] Si, si, j’en connais

Publié dans Chroniques

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article