CHRONIQUE 49

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CHRONIQUES  2009

 



QUARANTE – NEUVIEME SEMAINE





Du pataouète. Des cendres. Mon Camus. Du flamenco. Grandeur consécutive d'Allah





Quelle idée a eu notre Président d'appeler l'attention sur Albert Camus ! « Aouah ? Tu vas saouar. Sarko, Camus y volait le met au Ponthéon ! Ah l'ami, t'ias vu çà, purée! Mais son idée à Sarko, il a fait tchouffe. La honte à la figure elle me monte quand j'y pense .» Voilà, à peu près ce qu'auraient pu dire les copains de Belcourt de Camus, Pierre Fassina et d'autres, Esposito, Fernandez, Fleury, Hamoud, Lévêque, Médioni, Sarfati. Camus qui n'avait jamais accepté, de toute sa courte vie, qu'une seule distinction, la médaille de la Résistance, qu'on lui avait attribué d'office et en lui forçant la main. «  Qui m'a dénoncé ? » dira-t-il. Et le Prix Nobel de Littérature, qu'il dédia à son instituteur, Louis Germain, qui l'avait préparé au concours des bourses auquel il avait été reçu, avec Fassina justement. Camus, ses reportages en Kabylie, son engagement auprès des républicains espagnols, sa condamnation de l'utilisation de la bombe atomique, Camus né misérable, que les intellectuels bourgeois élevés au milieu des livres et d'une certaine culture n'ont pas compris, comme ils n'ont pas compris ses positions pendant la guerre d'Algérie. Lui qui n'avait pas fait l'École Normale Supérieure et qui n'était même pas agrégé ! Camus toujours d'actualité et toujours étudié.1 Qu'irait faire Albert Camus sur cette butte parisienne exposée à tous les vents, dans cette ancienne église Sainte Geneviève sur dimensionnée et au décorum pompeux., avec des inconnus2. Lui qui repose à Lourmarin, au soleil qu'il aimait tant, le soleil de sa Méditerranée, Tipasa 3 et la plage des Sablettes, et les plongeons, à l'algérienne, le « souprieux ». Camus dont les ennemis étaient « moscovites, bostoniens, athées et dévots »4 . Camus qui est depuis bien longtemps dans notre Panthéon personnel à nous, bien avant qu'un Président s'en mêle, ou s'emmêle.



Restons au soleil. Allez assister à un spectacle de flamenco, du vrai. Ne soyez pas surpris, dès la salle éteinte, une jeune femme assise au jardin profère d'une voix vigoureuse ce que vous prendrez pour des insultes ou des insanités, tant elle y met de c?ur. Son voisin, à la guitare essaie de la suivre et de se faire entendre. Il y réussit quand elle reprend son souffle. Puis c'est au tour d'une longue femme de danser. Vous voyez immédiatement que c'est une maitresse femme. Elle occupe tout l'espace, et elle a fière allure. Ses mains papillonnent et sa grande jupe virevolte sèchement. Le petit jeune homme qui la rejoint sur scène ne fait, à l'évidence, pas le poids. Il a beau tournoyer autour d'elle et faire le matamore, claquer des doigts, taper du pied, bomber le torse et cambrer les reins, elle le repousse d'un revers de mains et d'un balancement de hanche. On voit vite qui porte la culotte, et c'est un macho dépité qui retourne s'asseoir sur son banc. Les deux guitaristes font entendre alors leur petite musique et dans le silence retrouvé ils tricotent allègrement des doigts des rythmes entrainants ou nostalgiques. La chanteuse donne à nouveau de la voix et l'on comprend qu'elle chante la mort, la douleur, la séparation, ou des amours enfuis et on est triste avec elle. Puis tout le monde se réveille. La danseuse se met en transes et trépigne ardemment des pieds, pointes et talons, pendant que ses complices s'efforcent de faire le maximum de bruit en tapant dans leurs mains. La poussière s'élève du parquet. Il faudra bien se quitter dans un moment et dans la nuit froide et humide de fin novembre, rejoindre son chez soi, en rêvant des villages blancs, de Grenade et de l'Albacin d'où l'on voit si bien l'Alhambra et la Sierra nevada et où sont les gitans, au Sacro Monte.



Évitez de jardiner le vendredi 4 décembre, la lune nous le dit.

Notre Président lit Zadig, de Voltaire. En progrès, mais peut mieux faire.



Et c'est ainsi qu'Allah est grand.

1À ce jour, nombre de titres ajoutés à sa bibliographie depuis le 1er janvier 2009 : 16 livres,La nouvelle édition dans La Pléiade, 85 articles ou articles de livres.

2Vous connaissez Jacqueminot, comte de Ham, et de Kellie, et Emmanuel Cretet, le comte Walther et Beguinet et Tranchet ?

3« Au printemps, Tipasa est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l'odeur des absinthes... »

4La Chute

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